8h30, Bd Péreire. Je vais récupérer ma voiture chez le concessionnaire Volvo. Mon pas est rapide. Je passe devant une fenêtre ouverte au rez de chaussée d'un immeuble haussmannien. Un homme est accoudé à la fenêtre, prenant l’air du matin. Il doit être en train de décaper les murs avant de les enduire et passer la peinture. Il est torse nu et il est tout gris, uniformément gris : les cheveux, les sourcils, les membres… seuls les yeux bleus et vifs émergent de cette grisaille. On dirait un mineur ou un mime qui se seraient trompés de couleur. Je n’ai pas –pour une fois- mon appareil photo avec moi et regrette déjà cette "photo du siècle" que je ne prendrai pas et que je ne verrai plus jamais. Puis, je me rends compte que j’ai mon iPhone dans ma poche. Je fais demi-tour et lui demande si je peux le prendre en photo, dans cet encadrement de fenêtre noir, un superbe contre-jour à l’envers.
Contre toute attente, il me dit : non pas de photo ; j’insiste un poil, il renouvelle son refus. Je lui souhaite une bonne journée et m’en vais un peu déçu...avec cette photo magnifique au fond des yeux.
Je traverse le boulevard Péreire. Et suis presque arrivé au trottoir opposé. Une jeune maman marche en
sens inverse et s'apprête à traverser. Elle tient une poussette dans laquelle se trouve un bébé de quelques mois. Elle est accompagnée d’une petite fille turbulente de 3 ou 4 ans qui joue avec un ballon, et d’un petit garçon de 5/6 ans. Tout à coup, la petite fille lâche son ballon qui roule vers la chaussée ; la petite fille se précipite derrière le ballon qui est maintenant sur la chaussée. La mère lâche l’arceau de la poussette pour aller protéger sa fille, et aussitôt, la poussette commence à rouler sur la légère pente qu’on trouve désormais à tous les coins de rue et boulevards à Paris ; elle se dirige doucement mais sûrement vers moi qui suis encore sur la chaussée. Au moment où la poussette est à ma hauteur, je lève l'extrémité de mon pied et arrête la poussette, tel Superman arrêtant un train lancé à grande vitesse. Remerciement rapide de la mère un peu gênée par sa distraction. Moi, je souris et pense tout à coup à cette histoire que racontait Hergé, le géniteur de Tintin. Un jour il voit une vieille dame au bord du trottoir qui hésite à traverser. Il se précipite vers elle la prend part le bras et lui fait traverser la rue en profitant d’une accalmie de la circulation. Une fois de l’autre côté, la vieille dame se tourne vers Hergé et lui dit : Merci Monsieur, … mais je ne voulais absolument pas traverser…
Il arrive parfois que les B.A. ne soient pas récompensées.
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