Les militants de l’UMP se sont trompés d’élection. Ils ont cru adouber Nicolas Sarkozy pour la présidentielle, dans un fol espoir de revanche, ils ont remis en selle un candidat qui chauffe la salle à coup de promesses qui ne coûtent rien et n’engagent que ceux qui y croient.
Quelle erreur de casting ! Où trouve-t-on ailleurs qu’en France un clan des ex-présidents qui cherchent à tout prix à revenir au pouvoir ? Nulle part, si ce n’est en Italie, avec le triste exemple et affligeant spectacle de feu Berlusconi. En dehors de ce bling-bling politicard et de bunga-bunga politocard, aucune autre démocratie n’ose recycler les ex gouvernants ad libitum.
En France si, on continue. Alors que l’Italie a placé Matteo Renzi à la tête du gouvernement, nos quadras n’ont qu’à bien se (re)tenir. Sarkozy fait son come-back avec des idées d’arrière-garde et pour entourager sa vieille garde. Que prend-il comme première décision, à peine élu ? De créer un comité des anciens premiers ministres (encore n’ose-t-il pas ressusciter Chirac ou faire venir sa mégère en guise de lot de consolation !). Quelle idée, quelle foutaise. Aussitôt retoquée par deux d’entre eux (Fillon et Juppé) et acceptée du bout des lèvres par celui qui devait finir sur un croc de boucher (Villepin). On voit la stratégie, on voit surtout le malaise.
Un produit périmé Comment les militants de l’UMP ont-ils pu croire que c’était dans les vieux pots qu’on faisait encore la meilleure tambouille ? Comment les militants ont-ils pu se laisser berner par cette doublure du Sarkozy 2007, déjà largement démonétisé en 2012 et aujourd’hui totalement has been ? Il est vrai que 42% de ces mêmes militants n’ont pas voté, ce qui est déjà un signe quand le cavalier seul se voyait à nouveau sur le pont d’Arcole. Et que sur les 58% votants, seuls 64,5% lui ont porté leurs suffrages. C’est peu pour une reconquête qui se voulait triomphante en septembre quand il a annoncé son retour dans l’arène. Que n’a-t-il préféré rester auprès de sa reine Carlita et recevoir les hommages de ses affidés dans les salles où elle se produisait ? Il aurait pu rester confortablement le prince consort plutôt que de s’exposer à devenir le roi qu’on vire. Car ce qu’il faut lire dans ce médiocre score de cette élection du 29 novembre c’est que Sarkozy n’est plus en phase avec son temps, avec son électorat et qu’il va conduire en droite ligne l’UMP à son échec.
La faute aussi à ceux qui n’ont pas eu le courage de l’affronter et qui ont préféré piteusement se carapater et attendre que l’icône tombe de son piédestal ou se révèle (et se relève) à nouveau en général.
Bis repetita, le retour du RPR. On avait déjà connu ce scénario avec Chirac dans les années 90 qui avait phagocyté toute une génération, celle des « Rénovateurs » (Michel Noir, François Léotard, Michèle Barzach, Philippe Séguin…), sacrifiée sur l’autel des ambitions présidentielles du cheval piaffant dans son Hôtel de Ville de Paris. On voit un quart de siècle plus tard, la même histoire se reproduire avec Sarkozy qui préfère la terre brûlée à l’herbe plus verte des jeunes pousses. Ceci avec la complicité des militants qui se laissent berner. Résultat des courses, l’UMP au lieu d’avoir une ligne d’horizon dégagée, des perspectives nouvelles, se retrouve dans l’impasse. Après Copé la fripouille et ses copains de Bygmalion, c’est Sarko l’embrouille et ses amis de trente ans. Pas folichon. Pas franchement réjouissant pour un parti qui espère accéder au pouvoir et qui prétend sauver la France.
Mensonge, amnésie et revirements. Election après élection, il en est une qui va engranger des voix, des sièges et faire entendre sa voix, Miss Marine d’Arc Le Pen. Et la Jeanne du FN new look va aller ratisser large auprès d’autres moutons qui pâturent aux franges de l’UMP. Est-ce ainsi que Nicolas Sarkozy croit refaire sa campagne de 2007 ? En réalité, déconnecté des évolutions qui se sont fait jour, obsédé par son idée de brouter du Hollande et de reprendre l’Elysée, à mille lieues du quotidien des Français, lui qui émarge à 150 000 euros la séance de dédicace au Barheïn ou à Kuala Lumpur, l’ex président de la République n’a plus aucune sensibilité à l’actualité hexagonale et pour tout dire au peuple. D’ailleurs, que n’a-t-il pas dit en quittant son palais il y a deux ans et demi : que c’était fini, qu’on n’entendrait plus parler de lui, qu’il se retirait définitivement, que jamais il ne reviendrait, pire, qu’il n’occuperait pour rien au monde la place de président de l’UMP, qu’il avait déjà donné, que ce n’était plus digne de lui… Faut-il que la politique soit à ce point le champ du dédit et du mépris pour qu’un homme en fasse son lit et couche et découche avec toutes les maîtresses qui passent devant lui ? Faut-il que Marianne se tape un pareil zozo qui dit tout et son contraire dans le même espace, le même lieu, le même discours ?
Génuflexion ou devoir d’inventaire ? Les électeurs de droite et les militants de l’UMP ont un devoir en vue de 2016 (et qui n’a pas été accompli en 2012) : celui de bien réfléchir à leur devenir qui ne peut plus passer par cette figure du passé. Ils ont probablement hésité à rejeter leur ancien totem, lequel a encore son fan club, mais il faut qu’ils entendent ce tiers votant pour Le Maire et ceux qui n’ont pas souhaité s’exprimer (faute de choix ?). La France peut se passer de Sarkozy mais pas d’une opposition, ou d’une future majorité, soucieuse de progrès, de paix sociale, d’harmonie et d’une alternance somme toute très démocratique.
Le droit à la retraite avant la défaite. Ce n’est pas un club des sages qui devrait être mis en place au sein de la direction de l’UMP mais bien d’un club des retraités de la République où les vieux routards de la politique, de tous bords, siègeraient. Une maison de retraite où ils pourraient refaire leur monde en écoutant radio Nostalgie. Issus des partis, de l’Assemblée nationale et du Sénat, tous ces briscards aux promesses cousues de fil blanc, comme leurs cheveux, seraient mis au rencard officiel. Enfin, la France pourrait se regarder autrement et se rêver un avenir différent. Enfin, le renouvellement serait en marche, comme dans le sport, où chacun sait bien qu’il est un temps pour tout et qu’il faut savoir passer le flambeau.
Henri Jean Anglade
Photo : Gopixpic
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