Episode 58 :Cyrano de Macron lève le voile mais garde le cap
Dans son interview télévisée, ou pour parler un meilleur français, dans son entretien télévisuel, tel que l’aurait corrigé Edmond Rostand, Emmanuel Macron a évoqué tous les sujets qui fâchent et redéfinit sa tâche à l’hémistiche de son mandat, soit à son mi-parcours présidentiel.
Raison d’honorer un président qui s’exprime dans une langue plus châtiée que son prédécesseur au langage de charretier, Nicolas Sarkozy pour ne pas le citer qui, s’il joue encore le rôle de souffleur dans le théâtre d’ombres de l’Elysée, n’a cure de belles envolées lyriques mais se souvient que l’exercice du pouvoir n’est pas une sinécure.
Qui mieux que Cyrano et la fameuse tirade du « nez » pour traduire in petto la pensée du Président et la vigueur de son intention.
Ah ! non ! c’est un peu court, Monsieur Bouleau !
Vous ne pouvez pas me reprocher d’en faire trop
Puis à la question suivante, pas assez.
Idem pour vous Madame Salamé, chacun le sait
On ne gouverne pas les Français sur injonction
Pas plus qu’on ne les berce de douces illusions.
Pour ma part je crois en mon pays, sa destinée
Et je ne laisserai pas ceux qui m’ont dans le nez
Se livrer à toutes sortes de mensonges
Car il y a bien des maux qui nous rongent
Et ce n’est pas en les niant qu’on peut avancer
Bien au contraire il faut tenir bon sans balancer
Le cul entre deux chaises si vous me permettez
Cette expression qui peut paraître un peu grivoise
Et qui est une formulation en fait assez gauloise.
Alors laissez-moi vous dire que je conserve le cap
Et tout ce qui, jusqu’à lors, a été ma force de frappe.
Je tiens à parler aux Françaises et aux Français
Sans détour, en toute vérité
Et si vers eux j’avance masqué
C’est pour la bonne cause et leur éviter
Un trou d’air en plus de celui de la Sécurité.
J’adopte ainsi le ton qui convient,
Selon les circonstances, tantôt :
Vindicatif : « Moi, Monsieur si j’avais votre tarin
Je changerais de suite de boulot ! »
Doucereux : « Mais, Madame avec le vôtre
Je goûterais les pâtisseries de chez Lenôtre ! »
Eruptif : « Mais comment pouvez-vous sentir
Ce pays s’il ne peut vous souffrir ! »
Provocant : « Quelle est donc cette avancée
Si vous battez en retraite à la première fessée ! »
Mielleux : « Les Français sont comme les abeilles
Ils butinent, tuent le roi mais sur la reine mère veillent ! »
Affirmatif : « La politique, disons-le, parfois ça tourne à l’aigre
Mais on n’attrape pas les mouches avec du vinaigre ! »
Piquant : « Monsieur Mélenchon se gausse mais son blase
Le trahit quand il s’imagine en antonomase
Pourfendeur patenté, héraut en allume-gaz
Qui du présent croit toujours faire table rase
Pour revisiter un passé par antiphrase
Où c’est la lutte finale qui seule coche la case !
Amer : « Comment ? On négocie le Ségur de la santé
Et c’est l’hôpital qui se fout de la charité ! »
Ironique : « On dit que le pouvoir vous a retranché
Mais que les médecins vous ont débranché ! »
Perplexe : « On dit que le virus vous a atteint
Mais que les sondages vous ont éteint !
Ou bien serait-ce l’inverse, vous aviez du flair
Et voici que vous êtes privé de dessert ! »
Médical : « Quand le patient est malade du virus
Ce n’est pas en cassant le thermomètre dans l’anus
Qu’on peut efficacement le soigner
Pas plus qu’en lui tirant les vers du nez ! »
Patriotique : « Moi, Madame, la France je la hume,
Je la subodore, je la renifle, elle me gonfle les poumons
Et pas que... avec tout ce qu’on donne comme pognon
De dingue je la sens bien, sauf quand j’ai le rhume ! »
Surpris : « Mais pourquoi les Français vous ont dans le pif
Et croient-ils encore que le Macronisme est un gadget ?
Ne voient-ils pas qu’au bout il y a l’objectif
Et que pour y parvenir c’est un Castex, enfin, un casse-tête ! »
Déterminé : « la France est un vieux cheval fourbu
Qui se cabre et rue dans les brancards, ça tire à hue et à dia
Mais tenez bien les rênes et alors il ira droit
Pourvu que le chemin ne soit pas semé d’embûches ! »
Fataliste : « Qui a bu boira mais pour la dette le pays jamais repus
Sent bien qu’il tire un chèque
Sans provision et hypothèque
Son avenir mais cela reste un sentiment diffus
Comme un sparadrap qui lui pend au nez !»
Narcissique : « En moi il y a du Churchill et du Blair,
Des exemples à la pelle, de Gaulle et Eisenhower
De grandes figures qui jadis nous inspirèrent
Et qui aujourd’hui continuent d’être exemplaires ! »
Acerbe : « A tout ceux qui prétendent que je suis bien né
Je rétorque que j’ai aussi usé du poignet ! »
Modeste : « Quand on passe après Hollande, cette truffe,
On ne peut que voir haut et grand, mais à profil bas
Faute de quoi on est pris pour un Tartuffe ! »
Pifométrique : « Selon le dernier baromètre
Les premiers de cordée seront de corvée
Ce qui devrait permettre
Aux suivants de se mettre à rêver ! »
Courroucé : « Regardez-les à l’Assemblée piquer du nez
Roupillant entre deux questions, assignés
Là à résidence entre les travées à voter
Des lois qui s’empilent
Alors qu’eux rempilent ! »
Blasé : « Les Français resteront-ils résignés
A se confondre dans l’abstention
Ou bien à se morfondre dans l’illusion ! »
Interrogatif : « Prendriez-vous de la Chloroquine
Si la crise de régime était bénigne ? »
Conclusif : « Les vieilles barbes, les éléphants, tous des nazes
Ils ne voient pas que j’entre dans une nouvelle phase
Et confondent un civet de lièvre et un pâté de hase ! »
Souffrez, monsieur, que je m’arrête là
Car je vois bien que vous êtes petit bras.
Et vous Madame, laissez-moi vous préciser
Que l’art est difficile quand la critique est aisée.
Durant tout ce temps moi je n’ai pas chômé
Et je ne joue pas à Monsieur Homais.
Pensez-vous qu’on dirige sans gouvernail
Et qu’on ne risque pas d’aller à la baille
Si on ne tient pas ferme la barre ?
De cela et du reste, de la moitié et du quart
Vous n’avez pas la moindre idée car
Ce qui vous pend au bout du nez
C’est de la morve et je vous mouche
Parce qu’à la fin de l’envoi, je touche !
Henri-Jean Anglade
(à suivre...)
*Très librement inspiré de la Tirade du nez, premier acte (scène IV) de la pièce Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand (Folio)
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