Comment devenir Consul de France à Los Angeles ?
La récente nomination de Philippe Besson, écrivain estimable, au poste prestigieux de consul à Los Angeles a suscité la perplexité au Quai d’Orsay et un certain émoi et moi et moi dans les médias où les journalistes balancent entre jalousie et envie quand il s’agit de diplomatie littéraire, un art bien français où de Stendhal à Paul Claudel, de Giraudoux à St John-Perse en passant par Romain Gary, en tout auteur sommeille un ambassadeur potentiel de la grandeur nationale.
Réponse : Adopte un président !
En effet, discrètement, un décret du 4 Août (par un amusant clin d’œil de l’histoire, jour anniversaire du 4 août 1789 où fut votée par l’Assemblée nationale constituante l’abolition des privilèges féodaux !) annonçait dans le JO la nomination de 22 postes de consuls généraux à la seule décision du gouvernement.
Cet arbitraire de l’exécutif, dans un contexte où par ailleurs la diplomatie française est mise au régime pour raison de coupe budgétaire, va à l’encontre de ce que l’on aurait pu espérer des promesses du candidat Macron et heurte la sensibilité des fonctionnaires du Quai d’Orsay.
Valise diplomatique vs plume caressante
A tort ou à raison ? A tort, car ce n’est pas la première fois que de telles nominations ont lieu, du fait du Prince. De François-Régis Bastide, écrivain talentueux, animateur de l’émission « Le masque et la plume », que François Mitterrand, habitué du masque, nomma ambassadeur au Danemark, à Daniel Rondeau, ami de Bernard Kouchner alors aux Affaires étrangères, et ambassadeur à Malte, sous Sarkozy, les lettres vont souvent de pair avec les lettres de créance.
David Martinon en 2008 fut aussi choisi comme consul général à Los Angeles par le même Sarkozy après avoir été son porte-parole et il poursuit d’ailleurs sa carrière aujourd’hui comme ambassadeur en Afghanistan. Comme quoi ...
A raison cependant, car le nouveau monde esquissé par Macron aurait pu déboucher sur d’autres pratiques, moins ouvertement inspirée de l’ancien (monde) n’en déplaise à ce que le président a répondu : « Il n’y a chez mois aucun copinage pour services rendus ». Ce visa pour Los Angeles en guise de prix de l’Amérique pour Philippe Besson, ami de Brigitte et membre du club de la Rotonde*, conforte plus un changement dans la continuité qu’une révolution.
On pourra dire désormais, faire l’école « Bessonnière »
Cela dit, peut-être que la bibliographie** de Philippe Besson plaide pour lui : « En l’absence des hommes », « l’Arrière-saison » et « Arrête avec tes mensonges » pourraient figurer un aveu de culpabilité préméditée que « Un personnage de roman », qui relate la geste Macronienne, vient couronner de succès.
Alors, je lui suggère un titre pendant son consulat « Ma plus belle histoire d’humour c’est vous », en écho à la chanson de Barbara. Cela devrait lui permettre un rapatriement salutaire rue de Valois où le poste de ministre de la Culture se libérera sans doute prochainement.
Style laudateur cherche candidat vainqueur
En tout cas, pour ce qui me concerne, je vais étudier la liste des prétendants lors des prochaines élections et j’écrirai la chronique de leur victoire annoncée. Sur leur personne je m’attellerai à glorifier leur campagne et le génie qui les caractérise et je me dis que sur les deux ou trois sur lesquels je capitaliserai, le finaliste saura bien me récompenser à mon tour.
Si Macron sort à nouveau du chapeau, la cité des Anges me conviendra bien, si c’est Wauquiez, je veillerai à ce que ce soit pas la préfecture de la Haute-Loire en lot de consulation, tant qu’à manger des lentilles autant que ce soit des lentilles de corail au bord d’un lagon à Bora-Bora, si c’est Mélenchon, je m’assurerai que la relégation ne me conduit pas en poste à Caracas, si c’est un ou une autre au gré du destin, j’étudierai au cas par cas le moment venu. La plume en vaut la chandelle, non ?
Henri-Jean Anglade
* Philippe Besson était présent lors de la fameuse soirée du premier tour de la présidentielle au restaurant de La Rotonde à Montparnasse.
** Choix partiel et partial dans la production littéraire de Philippe Besson, d’un naturel fidèle, en tout cas à son éditeur puisque depuis 2001 ils sont tous parus chez Julliard (excepté « L’enfant d’octobre » chez Grasset en 2006).
- Son frère (2001) : parlait-il déjà de Macron ?
- Les jours fragiles (2004) : avait-il anticipé les faiblesses de son idole ?
- Un instant d’abandon : pensait-il à ce qui l’attend ?
- Se résoudre aux adieux (2007) : savait-il qu’il lui faudra quitter LA ?
- Un tango au bord de mer (2014) : était-il vraiment prêt à tout ?
- Les passants de Lisbonne : visait-il déjà l’ambassade au Portugal ?
- Arrête avec tes mensonges (2017) : sa lucidité n’était-elle pas diplomatique ?
- Un personnage de roman (2017) : n’avait-il pas percé le mystère M ?
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