Confinemensonge : le roman vrai du confinement (épisode 1) Un roman de mon ami Henri-Jean Anglade
A la première semaine du confinement, chacun continuait plus ou moins sa vie comme si de rien n’était, la vie n’allait pas s’arrêter pour un simple virus, fut-il mortel. On en avait vu d’autres. Référence à la grippe espagnole, au Sras ou à Ebola, on n’en était pas encore là. Enfin, pas chez nous, pas ici et surtout pas aujourd’hui. Pas dans ce merveilleux monde dans lequel nous vivons (nous vivions ?) et qui nous épargne bien des aléas. Petit jogging matinal, courses ici ou là, promenade du chien, les prétextes (ou les réflexes) à faire comme si sont trop nombreux pour changer ses habitudes. Bien sûr, le gouvernement nous lance des alertes, les médias surjouent en boucle les informations, infox comprises, les menaces commencent à peser, les morts à tomber comme des mouches, mais la vie est la plus forte, enfin, tant qu’il y a de l’espoir.
A la deuxième semaine du confinement, les mêmes qui rigolaient sous cape, qui croyaient que tout ça c’était « too much », ont pris conscience que le covid 19 était une sale bête qui pouvait les contaminer. Oh, pas tous et il y avait encore des plus forts que les autres qui continuaient de défier les nouvelles règles de savoir-vivre et refusaient de présenter leur laisser-passer, quitte à se faire verbaliser. Ceux-là, ce sont des durs à cuire, qui en ont vu et vous parlent de 40 comme s’ils avaient vécu l’exode et la guerre des tranchées dans un même film. L’exode justement, c’est le parti pris ou plutôt pas vu parti de milliers voire de millions de franciliens qui prennent la tangente pour retrouver les verts pâturages et les plages de sable fin, entre marais poitevin et bassin d’Arcachon, là où le virus n’a pas encore frappé. Pensent-ils. Et ils pensent mal. Car non seulement, dans cette débâcle morale, ils apportent ou risquent d’apporter le virus dans leurs bagages, mais en plus, ils vont encombrer des régions jusque là épargnées et qui n’ont pas toutes les moyens de lutter efficacement. Le désert médical dénoncé à longueur d’année n’a pas d’effet sur leur décision de prendre leurs cliques et leurs claques et de débarrasser le parquet de leurs beaux appartements de Passy-La Muette ou des avenues mornes du 7ème arrondissement, pour embarrasser le plancher des vaches. Courage, fuyons. Pourvu que ce soit dans notre Range Rover ou notre BM SUV.
A la troisième semaine du confinement, les mesures gouvernementales, quoique contestées, deviennent plus draconiennes. Ce n’est pas encore le couvre-feu, sauf dans certaines villes qui essaient de l’instaurer, mais chacun a bien compris que la crise était loin d’être finie et que la perspective de reprise s’éloignait. Les morts s’amoncellent et on a peine à les enterrer. Dans les familles à la peine, on n’a même plus le droit de les saluer. Enterrement troisième classe, à la sauvette. Plus personne pour suivre le corbillard si ce n’est quelques mouettes ou corbeaux selon l’assistance. Les croque-morts n’ont jamais aussi bien mérité leur nom, ils croquent monsieur, ils croquent madame et retournent à la cuisine sans même avoir le temps d’un avis de passage. La faux dézingue à tout va et les cimetières se remplissent à vue d’œil tandis que les églises se vident, un peu plus. Les exilés des bords de mer sur l’île de Ré jouent au scrabble et trouvent une nouvelle définition en quatre lettres : covid qui vaut immédiatement 19 points. Et parfois un aller sans retour.
A la quatrième semaine du confinement, les Français trouvent le temps long et ont les idées courtes pour s’adapter. Enfin, pas tous. Pour combattre, le mâle retrouve ses instincts grégaires, comme taper sa femme. Une baffe ou un coup de gourdin, fallait pas contrarier monsieur pendant qu’il regardait la télé. Privé de match de foot, il a repris la balle au bond, disons, la canette qu’il a envoyé dans les buts en traitant sa femme de pute. Tout le monde n’a pas la même approche du temps de loisirs par temps de coronavirus. A croire que le virus serait plutôt celui de la corona mal digérée. Ne faisons pas de mauvais esprit, beaucoup n’ont pas cette attitude mais les chiffres sont là pour l’attester. Les violences conjugales ont redoublé. Les écoliers eux ne redoubleront pas. En juin, c’est dit, ce sera Bac pour tout le monde. Fiesta par avance. Merci Monsieur Blanquer. Enfin un ministre qui atteint le 100% de résultats au Bac. Jack Lang en avait rêvé, Jean-Michel Blanquer l’a fait. Chapeau monsieur le Ministre de l’Education nationale. Dans les banlieues, c’est aussi la fête, la police est trop occupée pour faire des descentes, et si les chiffres de la mortalité grimpent à une hausse vertigineuse, les dealers sont eux aussi en chômage partiel. Foin de clients, le foin est à l’amende. Ce qui ne rend pas l’activité moins coupable mais moins lucrative. Il faudra se pencher sur la question : entre moins de morts de la drogue, des accidents de la route et ceux du Corona, peut-être que la balance sera excédentaire là où on le l’attend pas.
A la cinquième semaine du confinement, le comité scientifique mis en place par la Présidence de la République commence à se fractionner. Faut-il poursuivre ou non les mesures, les amplifier, les minorer ? L’Europe a fait montre de son unité dans la désunion, pire, dans la fragmentation. Chacun pour soi et Bruxelles pour tous. L’Europe est dans les choux et ne sait pas faire les bons choix. C’est une salade indigeste d’égoïsmes nationaux assaisonnée du piment populiste de tous les extrêmes et relevé du poivre de Hongrie auquel il ne manque que la crème polonaise pour parachever l’indigestion puisque la sauce anglaise fait désormais défaut. L’omelette européenne à 27 œufs cuit à petit feu sur une casserole trop grande pour de si petits chefs. Pendant ce temps, les milliers de cadavres s’amoncellent et les dirigeants eux cherchent la bonne recette et se refilent le virus en ajoutant passe-moi le sel. En Italie, Dieu est aux abonnés absents et le Pape ne sait plus où donner de la crosse. Urbi et orbi, la retransmission pascale aura lieu sous cloche, et le Pape avancera masqué. Cette année, à Pâques les cloches sont priées de la fermer.
Henri-Jean Anglade
(à suivre...)
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