Le mot Serendipité vient d'un Conte persan du XVième siècle traduit en anglais par Horace Walpole en 1754. C'est H. Walpole qui a inventé le mot "Serendipity". Dans ces Carnets de Serendipité qui paraitront vers le 15 Décembre, vous trouverez l'intégralité du Conte, que j'ai traduit en français (en effet, j'ai trouvé un peu difficile de partir du texte original en persan !). Et voici pour vous les premières pages de ce conte :
Il était une fois
Il était une fois un pays lointain, très très loin d’ici, un pays qui était presque au bout du monde. Ce pays s’appelait le Royaume de Serendip. C’était une ile, très vaste où l’on pouvait voir des montagnes d’émeraude couvertes d’arbres gigantesques, dressés vers le ciel. Et dans ce pays, il y a très très longtemps vivait un roi puissant et sage à la fois. Ce roi s’appelait le Roi Jafer.
Le Roi Jafer avait trois fils. Ces trois fils étaient sûrement marqués par le destin : le jour de leur naissance, un oiseau étrange et magnifique aux ailes dorées et aux yeux de feu apparut, dans le ciel de Serendip. Personne ne vit cet oiseau qui planait majestueusement. Personne... sauf quelques enfants, tout près de l’ancienne montagne de la Grande Sérénité.
Le Roi s’efforçait de préparer le mieux possible ses trois fils, en vue du jour où ils pourraient lui succéder à la tête du Royaume de Serendip. Il souhaitait qu’ils passent maîtres en 3 domaines : en vertu, en sciences et en sagesse. Le Roi, lui-même grand sage, chercha dans son royaume et même dans les royaumes limitrophes des femmes ou des hommes qui étaient encore plus sages que lui pour enseigner ces trois sujets à ses enfants.
Hélas, il y eut peu de maîtres qui osèrent traverser l’océan pour venir au Royaume de Serendip ; en effet, ils auraient dû alors traverser les flots qui entouraient le royaume et y affronter de grands dangers. L’océan était infesté d’énormes dragons redoutables qui attaquaient les navires avec leurs énormes pinces et trouaient les coques d’un seul coup de queue. Les quelques précepteurs qui réussirent à surmonter ces dangers redoutables pour devenir les précepteurs des trois Princes étaient courageux, intrépides, et sages. Ils leur donnèrent rapidement l’envie et les capacité de regarder le monde tant avec leurs yeux qu’avec leur cœur.
Les trois Princes étaient bons élèves. Leurs maîtres leur donnèrent non seulement les secrets de la vertu, les principes des sciences et les postures de la sagesse mais aussi les manières de contourner les pièges de la grammaire, des langues, de la poésie et de la musique. Et ils passèrent aussi maîtres dans l’art de conduire les éléphants, qui étaient les animaux les plus nombreux et les plus utiles dans ce Royaume de Serendip.
Quand les trois Princes atteignirent l’âge de raison, le Roi Jafer décida d’éprouver leur caractère et leur fermeté d’âme ; il les fit mander dans la salle du trône, chacun leur tour. À son fils aîné, le Roi Jafer prononça ces mots, en tenant la couronne du royaume au-dessus de sa tête :
- Mon fils, je veux que tu deviennes Roi, maintenant.
Le prince remarqua que les mains paternelles qui tenaient la lourde couronne ornée de diamants et d’émeraudes ne tremblaient pas ; il lui répondit :
- Père, avec tout le respect que je vous dois, je décline votre proposition. Je ne sens pas encore prêt à régner sur Serendip.
Quand son fils puîné entra, le roi descendit de son trône magnifique et proposa à son fils de s’y asseoir à sa place,
- Mon fils, le temps est venu pour toi de devenir le nouveau Roi.
Le Prince écouta très attentivement la voix de son père et remarqua combien elle était encore claire et puissante. Il lui répondit :
- Père, vous êtes un grand roi et vous pouvez continuer de régner sur le Royaume pendant encore de très nombreuses années.
Alors, le Roi fit mander son plus jeune fils, et lui demanda aussi de devenir le Roi, à sa place. Le jeune prince remarqua l’étincelle au fond des yeux de son père et il comprit immédiatement qu’il voulait le mettre à l’épreuve.
- Oh non, grand Roi, je suis encore un enfant ; vos yeux sont encore clairs et votre esprit alerte.
Le Roi Jafer fut un peu surpris mais néanmoins satisfait du résultat de ces trois épreuves. Ses fils étaient sages et modestes. Il décida cependant de compléter leur éducation en les envoyant visiter d’autres pays. Il savait que tant qu’ils n’auraient pas vécu en dehors du royaume, ils ne connaitraient pas l’existence d’autres bons peuples à travers le monde, qui eux aussi pouvaient avoir de bonnes idées et d’autres manières de penser, de vivre, de se comporter. En plus de ce programme ambitieux, le Roi espérait que ses trois fils puissent, chemin faisant, trouver la solution qui libère enfin le royaume de tous les monstres marins qui infestaient l’océan alentour.
Il les rappela alors tous les trois et leur dit :
- Mes très chers fils, les anciens du royaume m’ont dit que les brumes et brouillards de l’an dernier se sont mystérieusement cristallisés et ont servi à écrire une formule magique ; cette formule, d’une centaine de lignes, se présente sous la forme d’un poème couché sur un parchemin. Ce poème s’appelle la Mort des Dragons. Celui qui possédera la formule pourra fabriquer une potion magique. Versée dans l’océan, cette potion magique empoisonnera et tuera tous les dragons qui entourent notre cher royaume.
- Je vous envoie tous les trois chercher la formule magique de la Mort des Dragons. Ne revenez pas sans l’avoir trouvée, ou sans que je vous en aie donné l’ordre.
@suivre !
Les illustrations sont de Stéphane Bussy
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